Job et finances: les perspectives de la génération Z
Millennials, veuillez faire de la place pour la toute nouvelle Génération Z, aussi appelés Zoomers. Nés entre 1996 et 2010, ces jeunes ferrés en informatique, dotés d’un esprit entrepreneurial et conscients de la problématique climatique intègrent doucement la population active, et font jouer leurs muscles financiers. À plus long terme, ils sont en outre susceptibles d’hériter d’un capital appréciable de la part des baby-boomers, un transfert de richesse qui pourrait influencer la structure des marchés d’investissement pour des décennies à venir.
De prime abord, l’avenir financier de la dernière génération en date à parvenir à l’âge adulte ne semble pas tout rose. Elle a atteint la majorité dans un contexte pour le moins difficile: crise financière mondiale, pandémie qui a fait près de sept millions de victimes dans le monde et menace croissante posée par le changement climatique à l’environnement humain. En parallèle, les gouvernements de nombreux pays, à court d’argent, ont arrêté de financier les études supérieures, retardé l’âge de la retraite et mis un terme à d’autres avantages sociaux.
Parvenir à l’indépendance n’a jamais été aussi onéreux, et pourtant c’est précisément ce à quoi les Zoomers aspirent. Le prix moyen d’un bien immobilier au Luxembourg dépasse le million d’euros en 2023, tandis que le salaire annuel moyen se monte à 72.250 EUR. Ainsi, devenir propriétaire d’un logement semble de plus en plus utopique pour les jeunes générations, sauf s’ils en héritent. L’herbe n’est pas beaucoup plus verte sur le marché de la location, dès lors qu’il vous faudra débourser 1.610 EUR par mois pour un appartement une chambre moyen à Luxembourg-Ville.
Carrières fluides
Dans le même temps, leurs carrières sont susceptibles d’être moins sécurisées, par choix ou par nécessité. Alors que la retraite n’est qu’une perspective lointaine, les membres de cette génération seront plus prompts à choisir une carrière beaucoup plus fluide (ce que l’on appelle en anglais une « portfolio career ») que leurs parents, caractérisée par des emplois à court terme ou ciblant un projet, des fonctions plus formelles et des pauses consacrées à de nouvelles formations. Jusqu’ici, ils semblent rejeter en bloc les carrières qui consistent à gravir péniblement les échelons: ils sont par exemple beaucoup moins enclins à se tourner vers le juridique que par le passé. La jeune génération méprise cette profession, la considérant comme guindée, sexiste et inflexible.
Ils ont grandi dans des foyers dont la sécurité financière était moindre. Dans une étude menée en 2020 par le Pew Research Center, basé à Washington D.C., la moitié des jeunes les plus âgés de la génération Z, à savoir ceux de 18 à 23 ans, ont déclaré qu’eux-mêmes ou un membre de leur ménage avaient perdu leur emploi ou accepté une réduction de salaire en raison de la pandémie de Covid-19. À titre de comparaison, ils étaient 40% parmi les Millennials (nés entre 1981 et 1995), 36% pour la génération X (nés entre 1965 et 1980) et 25% seulement chez les baby-boomers (nés entre 1946 et 1964).
Ils sont experts dans l’utilisation d’Internet, ce qui influence leur prise de décisions, financières notamment.
Mais ces nouveaux venus possèdent également un éventail unique de compétences indispensables aux employeurs. Ils sont des «natifs du numérique»; c’est la première génération à avoir grandi avec Internet au quotidien. À l’inverse des Millennials, qui ont dû naviguer les méandres des médias sociaux sans aide aucune, les Zoomers sont bien plus habiles pour gérer leur présence en ligne. Ils sont également experts dans l’utilisation d’Internet, ce qui influence leur prise de décisions, financières notamment.
Contraintes financières
Toutefois, ces compétences sont peu susceptibles, à moyen terme tout du moins, de leur ménager un important patrimoine financier, dont la majeure partie est toujours détenue par leurs parents ou grands-parents. Nombre d’entre eux doivent assumer de lourdes dettes, héritées de leurs années d’études, ce qui restreint leur capacité à épargner en vue de l’achat d’un logement, de leur retraite ou même de voler de leurs propres ailes.
Une nette majorité de membres de la génération Z (61%) déclarent être relativement ou fortement dépendants de leurs parents sur le plan financier, selon une enquête menée récemment par Experian. Si toutes les générations précédentes disposaient de fonds relativement maigres au début de leur vie active, le dernier groupe en date est confronté à un ensemble complexe et inédit de contraintes financières.
Néanmoins, ils possèdent un atout majeur: ils devraient hériter d’une grande partie de la fortune des baby-boomers, estimée à 70.000 milliards USD rien qu’aux États-Unis. Ce transfert de richesse pourrait à terme conférer à la génération Z un pouvoir financier considérable et une énorme influence potentielle sur les entreprises, la société et les gouvernements. Ils pourraient finir par être mieux lotis que n’importe quel groupe d’âge avant eux à mesure que les richesses des générations passées leur parviennent, bien que la plupart devront attendre un certain temps avoir de voir la couleur de cet argent.
Les Zoomers aborderont probablement l’épargne et l’investissement d’une manière totalement différente de celle de leurs prédécesseurs.
Les Zoomers aborderont probablement l’épargne et l’investissement d’une manière totalement différente de celle de leurs prédécesseurs. Les analystes de McKinsey dressent le constat suivant: « De nombreux membres de la génération Z éprouvent de l’anxiété vis-à-vis du climat, déclarant qu’ils s’interrogent tous les jours sur le sort de notre planète. Connus pour leur idéalisme, ils font partie d’un nouveau groupe de consommateurs inclusifs et de rêveurs socialement progressistes. » Le cabinet de conseil avance que cette génération exige des entreprises avec lesquelles elles s’engagent la définition d’un objectif et une prise de responsabilités, une tendance qui se reflétera certainement dans leurs priorités d’investissement.
Transmission de patrimoine
Les personnes âgées reconnaissent en nombre la nette disparité entre les opportunités qui leur étaient offertes et celles dont disposent leurs enfants ou petits-enfants issus de la génération Z. Ils peuvent toutefois contribuer à remédier à ce problème. Un des moyens les plus importants est la planification successorale, visant à garantir une répartition équitable et efficace de l’argent entre les membres de la jeune génération.
Les générations passées devront certainement reconnaître par ailleurs que la génération Z aura peut-être besoin de davantage d’aide pour s’émanciper que leurs prédécesseurs; transmettre sa richesse de manière précoce pourrait être nécessaire à ce processus. Les assister financièrement pour leurs études, l’acquisition d’un logement voire leurs dépenses courantes lors des premières années de leur carrière pourrait être crucial pour les aider à mener une vie indépendante. Selon une enquête menée récemment par Bankrate, un site de finance personnelle basé aux États-Unis, les quatre priorités financières des Zoomers sont les frais d’éducation, le lancement d’une carrière, l’établissement d’un budget et la constitution d’un fonds d’urgence. On est loin des rêves de voitures de course ou de retraite anticipée.
Les quatre priorités financières des Zoomers sont les frais d’éducation, le lancement d’une carrière, l’établissement d’un budget et la constitution d’un fonds d’urgence.
La génération Z a dû grandir dans l’insécurité, et son avenir financier semble tout aussi incertain. Ses membres sont peut-être hautement instruits et incollables sur les aspects technologiques, mais ils devront s’en sortir sans les aides de l’État dont ont bénéficié leurs parents et grands-parents. Il est possible qu’ils finissent par hériter d’une grosse somme d’argent, mais la plupart devront encore patienter un moment. En attendant, les générations précédentes doivent réfléchir aux moyens à leur disposition pour les aider.