L’entrepreneur, cet être en proie aux émotions
Quelques pistes intéressantes issues de la recherche comportementale
Si de bonnes idées, un business plan bien ficelé et des partenaires fiables sont certes indispensables, cela ne suffit pas à assurer la pérennité et le succès de votre entreprise. Votre réussite ne repose en effet pas uniquement sur des éléments rationnels, mais aussi sur vos décisions. Or, celles-ci sont systématiquement influencées par des émotions et des biais cognitifs. Il convient donc de bien comprendre les facteurs qui peuvent conduire aux erreurs de jugement afin de s’en prémunir au mieux. En science comportementale, ces facteurs sont appelés « biais cognitifs ». Bien maîtrisés, ces biais peuvent être bénéfiques – après tout, l’innovation n’existerait pas sans prise de risque.
Le danger de la confiance en soi
L’excès de confiance constitue sans aucun doute le biais cognitif le plus important à apprivoiser. Ce sentiment de toute puissance peut avoir pour effet de nuire à votre capacité à prendre des décisions et à gérer des situations spécifiques. Face à une tâche difficile, l’entrepreneur est souvent confronté à un décalage entre la réalité objective et la confiance en ses propres jugements. Vous devez donc apprendre à reconnaître vos propres limites et à admettre que vous n’avez pas les compétences ou les connaissances nécessaires pour maîtriser seul tous les défis qui se présentent à vous.
Le biais d’optimisme est également un grand classique parmi les entrepreneurs, surtout lorsque ceux-ci sont déjà victimes de l’excès de confiance. Il peut vous amener à décider sur la seule base d’une croyance, sans tenir compte des faits objectifs, et donc à adopter des comportements décisionnels excessivement risqués. Il convient, en tant qu’entrepreneur, d’espérer le meilleur tout en étant préparé au pire, ce qui implique d’intégrer tous les faits pertinents dans votre processus décisionnel, en ce compris les scénarios catastrophes auxquels vous n’avez forcément envie de penser.
Un entrepreneur trop sûr de lui a en outre tendance à rechercher ou à interpréter l’information d’une manière qui confirme ses idées préconçues, ce qui le rend aveugle à tout élément qui remet en question ses points de vue et jugements. Le biais de confirmation peut vous conduire à ignorer des chiffres ou des informations d’une importance cruciale pour votre entreprise. Il convient donc de ne pas laisser vos opinions prendre le pas sur la réalité. En tant qu’entrepreneur ou fondateur, vous devez accepter les critiques et les informations négatives afin de les exploiter de manière intelligente.
Il convient de bien comprendre les facteurs qui peuvent conduire aux erreurs de jugement.
Tout ne se passe pas toujours comme prévu
Les délais trop ambitieux constituent par ailleurs un danger. De nombreux entrepreneurs sous-estiment le temps et les ressources nécessaires à la réalisation de leurs projets. Il en résulte des erreurs de planification, souvent liées à l’excès d’optimisme, susceptibles d’être fatales pour une entreprise qui ne disposerait d’aucun « plan B », comme c’est souvent le cas. Pour éviter cela, il faut accepter que les choses ne se passent pas toujours comme prévu dans le monde de l’entreprenariat. Quoi qu’il arrive, identifiez les risques potentiels et prévoyez ce fameux « plan B ». Malgré votre envie de tout faire rapidement, donnez-vous des délais raisonnables pour atteindre vos objectifs.
Le biais cognitif des coûts irrécupérables décrit la tendance à poursuivre un projet à tout prix au prétexte d’y avoir déjà investi beaucoup de temps, d’efforts ou d’argent, que les coûts effectifs l’emportent ou non sur les résultats escomptés. Cette attitude « jusqu’au-boutiste » peut rapidement vous conduire sur une voie sans issue et mettre en péril votre entreprise. En persistant sur un mauvais chemin, l’entrepreneur va perdre son temps et son argent dans un projet voué à l’échec. Il est donc important de déterminer régulièrement, y compris pendant la phase de mise en œuvre d’un projet, si l’investissement en vaut la peine.
Face à des options trop variées, à des décisions trop complexes ou à un environnement trop incertain, l’entrepreneur peut se retrouver dans l’incapacité de décider ou d’agir. La tentation qui consiste à repousser le moment de choisir est grande. Mais en maintenant en permanence le statu quo, notre homme s’expose à un risque important. Le plus grand danger est de passer à côté de belles opportunités, surtout en matière d’investissement.
Techniques de débiaisement
Pour éviter les biais cognitifs, il existe plusieurs techniques de débiaisement, qui peuvent être intégrées dans le processus de prise de décision. Trois pistes possibles :
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- La désignation d’un « avocat du diable » qui, à un moment du processus, soutient de manière ciblée et consciente des contre-arguments afin de révéler les faiblesses d’une proposition donnée.
- La réunion « pré-mortem », qui part du principe qu’une future décision va échouer et cherche à expliquer pourquoi.
- La solution « à deux équipes », dans le cadre de laquelle deux équipes travaillent chacune de leur côté sur le même problème et confrontent leurs résultats.