Succession : l’état civil est déterminant
Le droit successoral luxembourgeois à la loupe pour vous aider à y voir plus clair et mieux vous préparer.
Au Luxembourg, le contenu concret de votre succession dépend de votre état civil. Si vous êtes marié, la composition de votre succession dépendra de votre régime matrimonial. Il existe trois régimes distincts : régime de la communauté légale, régime de séparation de biens pure et simple et régime de la communauté universelle.
Le régime de la communauté légale s’applique automatiquement lorsque les époux ne signent pas de contrat de mariage particulier. Il établit une distinction entre deux types de patrimoines : le patrimoine propre à chacun des époux (tous les biens acquis avant le mariage ainsi que par succession et donation) et leurs biens communs. Ces derniers comprennent les revenus du travail de chacun des époux, les fruits et rentrées des biens qui leur sont propres, ainsi que les biens achetés par les époux pendant leur mariage.
Si aucun autre choix n’est fait lors du mariage, le régime de la communauté légale s’applique.
Sous le régime de la séparation des biens, il n’existe en principe pas de biens communs entre les époux. Cela ne signifie pas que les époux mariés sous ce régime ne peuvent posséder un bien en copropriété, par exemple s’ils achètent un bien chacun pour moitié ; ces biens sont des biens indivis. En cas de dissolution du mariage, les biens pour lesquels aucun des conjoints ne peut prouver qu’ils sont sa propriété exclusive sont réputés appartenir indivisément aux deux époux, chacun pour moitié. Ceci vaut aussi pour l’argent sur des comptes communs. Chaque époux reste seul tenu de ses dettes, sauf pour ce qui concerne celles contractées pour l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants qui obligent toujours les deux époux. En cas de divorce ou de décès, les époux ne devront partager que les biens indivis. Les biens propres ne devront pas être partagés.
Sous le régime de la communauté universelle, le patrimoine propre des époux se limite uniquement aux biens et droits personnels comme les vêtements, outils de travail, etc. Tout le reste fait partie de la communauté, y compris les dettes. En cas de dissolution du mariage, chaque partie se voit attribuer, en théorie, la moitié de chaque élément constituant le patrimoine universel. En cas de décès, le conjoint survivant hérite de la totalité du patrimoine si ce régime avait été assorti d’une « clause de survie » attribuant au conjoint survivant l’intégralité de la communauté.
Établir un bilan patrimonial
Toute personne qui souhaite bien préparer sa succession devrait dresser le plus tôt possible un bilan patrimonial et l’adapter régulièrement. L’établissement d’un tel bilan exige de faire un inventaire précis. Il vous est donc conseillé de créer un dossier rassemblant tous les documents importants : contrat de mariage, jugement de divorce, livret de famille, titre de propriété et contrats de copropriété, certificat concernant les objets de valeur et les passifs, informations sur les principaux interlocuteurs officiels en cas de décès, etc.
L’établissement d’un bilan patrimonial exige de faire un inventaire précis.
Le moyen le plus fiable pour régler la succession est, et restera, le testament. Il s’agit d’un acte unilatéral par lequel une personne lègue ses biens à des personnes désignées. Certaines restrictions légales doivent toutefois être respectées, plus particulièrement en ce qui concerne les héritiers légitimes.
Toute personne peut établir un testament, à condition d’être saine d’esprit, d’être en capacité d’exprimer librement et valablement ses volontés et d’avoir plus de 16 ans. Un mineur entre 16 à 18 ans ne peut disposer que de la moitié des biens dont un majeur peut disposer en vertu de la loi.
Le testament est un acte solennel qui requiert un écrit pour être valable. Il en existe trois types : Le testament authentique ou par acte public, qui doit être fait devant un notaire et deux témoins ou devant deux notaires, être signé de la main du testateur et avoir été rédigé par le notaire. Le testament olographe, qui doit être intégralement rédigé de la main du testateur, daté et signé.
Le testament dit mystique ou secret. Il s’agit d’un acte écrit, signé par le testateur et présenté par ce dernier dans un contenant clos et scellé à un notaire, en présence de deux témoins. Le notaire dresse alors un acte de souscription authentique, qui doit être signé par le testateur, le notaire et les deux témoins.
Si le testament olographe est plus simple à rédiger et moins onéreux, l’intervention d’un notaire dans la rédaction d’un testament authentique présente l’avantage d’éviter des vices de forme ou de fond susceptibles d’invalider vos dernières volontés.
50% Si aucun testament n’est établi, la succession du défunt sera partagée entre ses parents proches. Le bénéficiaire de votre succession mais également la part de la succession qui revient à chacun de vos héritiers sont définis par le droit civil. Comme dans de nombreux pays, il existe au Luxembourg une réglementation sur la réserve héréditaire qui interdit de déshériter totalement ses enfants et définit quelle est la part minimum d’une succession qu’ils doivent recevoir après le décès de leurs parents. Un enfant unique recevra au moins 50% du patrimoine, deux enfants au moins 67% et trois enfants ou plus au moins 75%. Sont notamment exonérées les successions suivantes : tout ce qui a été reçu ou acquis en ligne directe descendante, c’est-à-dire de parents ou de grands-parents à des enfants, petits-enfants, etc. ou en ligne ascendante, d’enfants ou de petits-enfants à leurs parents ou grands-parents. L’exonération est toutefois limitée à la part légale de la succession. |
La parole compte
Quelle que soit la forme choisie, chacun est libre de modifier ou de révoquer à tout moment son testament, dans le respect des règles légales. Toutefois, il convient de noter qu’un testament authentique ne peut être révoqué que par un nouveau testament authentique.
Il convient de veiller à ne pas laisser son testament à l’intérieur d’un coffre bancaire, car il restera inaccessible tant que celui-ci sera bloqué. De plus, lors de l’inventaire du coffre et de la découverte du testament, le notaire remettra l’intégralité du contenu du coffre, y compris le testament, à l’intérieur et celui-ci sera à nouveau bloqué. Seul un notaire pourra alors prendre connaissance du contenu du testament.
Règles fiscales
Dans le cas d’une succession, l’héritage est assujetti à deux types d’impôts : les droits de succession et les droits de mutation.
Des droits de succession sont dus lorsque le défunt vivait au Luxembourg. Ils sont calculés sur la base de l’ensemble des biens meubles (situés au Luxembourg et à l’étranger) et immeubles (situés au Luxembourg uniquement) qu’il possédait, déduction faite des dettes et des frais funéraires. Leur montant varie en fonction du degré de parenté entre le défunt et l’héritier, mais aussi de la valeur des biens composant la succession.
Il convient de noter qu’il existe deux taux différents, l’un applicable aux biens constituant la réserve héréditaire, l’autre à ceux n’en faisant pas partie. Ces taux sont compris entre 0 et 15%. Le taux de base est ensuite majoré progressivement en fonction de la valeur nette imposable de la part reçue, si celle-ci excède 10.000€. Cependant, aucun droit de succession n’est dû au Luxembourg dans les cas suivants :
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- biens acquis en ligne directe (entre parents, grands-parents et enfants, à l’exclusion de la part extra-légale en ce qui concerne ces derniers) ;
- biens revenant à des conjoints ou des partenaires (liés par une déclaration de partenariat inscrite depuis au moins trois ans) ayant des enfants ;
- immeubles situés à l’étranger ;
- successions n’excédant pas 1.250€.
Des droits de mutation sont dus lorsque le dernier domicile du défunt n’était pas situé au Luxembourg. Ils sont calculés uniquement sur la base des immeubles situés au Luxembourg (détenus en pleine propriété ou en usufruit par le défunt). Le régime fiscal des droits de mutation est identique à celui des droits de succession.
La donation de biens de son vivant peut limiter la charge des droits de succession.
Une solution judicieuse pour les transmissions entre vifs
Il peut être judicieux de donner des actifs de son vivant, afin de réduire les droits de succession ou de contourner les règles en matière de réserve héréditaire, tout en restant dans la légalité. Toutefois, cela dépend de la capacité à renoncer au droit de propriété et à l’usage des actifs. Les autorités sont par ailleurs très attentives aux dispositifs visant uniquement à réduire la charge fiscale et insistent sur le fait qu’un donateur ne peut conserver les avantages associés à un actif qui a fait l’objet d’un don. Au Luxembourg, les dons effectués du vivant d’un individu sont assujettis à l’impôt, mais son montant est généralement inférieur à celui dû au titre des droits de succession.