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19 décembre 2024

Entreprises et impact social – considérer toutes les parties prenantes

Se forger la réputation d’une entreprise ne prenant pas suffisamment ses responsabilités quant à la place qu’elle occupe dans la société est de plus en plus dangereux. Dans un monde caractérisé par l’omniprésence des communications électroniques, les entreprises qui maltraitent leurs employés ou exploitent leurs fournisseurs, qui négligent leur empreinte environnementale ou carbone ou qui ne communiquent pas de manière honnête et transparente avec le monde au sens large courent le risque d’être soumises à une surveillance réglementaire ou de voir leur réputation entachée, ce qui pourrait compromettre leur capacité à obtenir des financements et inciter leurs clients à aller voir ailleurs. Alors que les regards extérieurs se font toujours plus insistants, à quoi ressemble une entreprise responsable?

Toute entreprise compte un large éventail de parties prenantes. Citons notamment les actionnaires, mais aussi les fournisseurs, les distributeurs et autres partenaires commerciaux, les membres du personnel ainsi que la communauté au sens large dans les villes et pays où elle mène ses activités. Savoir jongler avec ces différentes relations est un aspect clé d’une gestion efficace de la responsabilité sociale. Les rendements des investisseurs ne devraient pas prendre le pas sur le bien-être des employés ou la protection de l’environnement.

De plus en plus, les intérêts de ces diverses parties prenantes convergent à long terme. Les entreprises faisant preuve d’une mauvaise conduite environnementale pourraient devoir débourser des sommes considérables pour réparer les dommages causés, et être confrontées à des coûts de financement accrus alors que les banques cherchent à gérer leurs propres responsabilités et à protéger leur réputation. Une piètre gestion des chaînes d’approvisionnement peut également mettre à mal l’image d’une société, voire son cours et sa valeur de marque.

Aujourd’hui, le cadre législatif renforce de plus en plus les pressions exercées sur les entreprises pour les inciter à divulguer comment elles répondent aux considérations environnementales, sociales et de gouvernance. La directive de l’Union européenne en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, entrée en vigueur en janvier 2023, exige l’établissement d’un rapport de durabilité de la part de toutes les grandes entreprises d’intérêt public qui emploient plus de 500 personnes. Bientôt, cette exigence concernera également les grandes entreprises avec moins d’employés ainsi que les PME cotées.

Toute entreprise se doit de gérer efficacement ses relations et ses opérations dans quatre domaines clés: le personnel, l’environnement, la communauté locale ou étendue et les contreparties externes.

Toute entreprise se doit de gérer efficacement ses relations et ses opérations dans quatre domaines clés: le personnel, l’environnement, la communauté locale ou étendue et les contreparties externes (fournisseurs, investisseurs, clients, etc.).

Repenser les relations de travail

Passer d’un monde où la loyauté envers l’entreprise était acquise à un environnement où elle doit être gagnée a été difficile pour de nombreuses entreprises. Un marché de l’emploi plus concurrentiel et des attentes plus élevées quant à la satisfaction que l’on tire de son travail ont transformé la relation entre employeurs et employés. Les entreprises doivent réfléchir davantage et se montrer plus créatives quant à la façon dont elles peuvent fidéliser leur main-d’œuvre et la rendre productive.

Elles prennent davantage conscience de la nécessité d’offrir un environnement accueillant pour les employés, dans la mesure où elles doivent souvent rivaliser avec les avantages du travail à domicile. Obliger les employés à travailler dans des alcôves mornes, à se disputer chaque matin les places de parking ou encore à faire des trajets stressants sur des routes bondées n’est pas la meilleure manière de garantir leur bien-être et leur épanouissement, un constat qui s’impose de plus en plus. Les entreprises visionnaires ont mis en place certaines mesures, comme des douches sur site à disposition des employés qui souhaiteraient venir au travail à vélo, ou encore des heures de travail flexibles qui permettent au personnel d’éviter les transports en commun surchargés durant les heures de pointe.

Elles comprennent également mieux l’importance de la lumière naturelle, des plantes ou d’une acoustique bien pensée, qui contribuent toutes au bien-être. Il est également possible de créer des espaces de relaxation, offrant aux employés intimité et solitude pour prendre le temps de réfléchir, ainsi que des espaces de collaboration où se rassembler dans une ambiance décontractée. Un environnement ingénieusement planifié peut sensiblement améliorer le bien-être des employés et, partant, leur productivité.

Un environnement ingénieusement planifié peut sensiblement améliorer le bien-être des employés et, partant, leur productivité.

Apporter diverses formes de soutien à son personnel revêt également une grande importance. Tous les employés ou presque rencontrent tôt ou tard des problèmes; il peut s’agir d’une rupture, d’un deuil, d’un problème de santé ou d’autres soucis d’ordre privé. Disposer de la structure de soutien adaptée pour aider tout un chacun à gérer ces problèmes n’est pas seulement correct d’un point de vue moral, c’est également un outil redoutable pour susciter la loyauté des employés individuels, mais aussi de la main-d’œuvre tout entière.

Pour les parents actifs, les options de garderie peuvent être un élément déterminant pour savoir si leur emploi s’accordera avec les autres aspects de leur quotidien. En outre, offrir une flexibilité suffisante pour permettre aux employés de gérer de front leurs responsabilités parentales et leurs engagements professionnels est susceptible de stimuler la productivité à long terme, garantissant ainsi que les employés appréciés et les compétences irremplaçables restent dans l’entreprise.

Prudence en matière environnementale

Une mauvaise gestion des risques environnementaux coûte aujourd’hui très cher, tant sur le plan financier que de la réputation. Des entreprises de tous secteurs, de la fabrication automobile au traitement et à la distribution de l’eau, ont été soumises à de lourdes pénalités financières et autres sanctions réglementaires et ont vu leur image ternie et leur valorisation réduite en raison d’une mauvaise conduite environnementale. Il s’agit également d’un facteur important dans le recrutement. Une enquête menée récemment révèle en effet que 86% des millennials accepteraient de gagner moins pour pouvoir travailler dans une entreprise qui partage leurs valeurs.

La gestion et la réduction des émissions de gaz à effet de serre peuvent impliquer de rechercher des alternatives aux voyages d’affaires, de mettre en place des programmes de recyclage et de réduction des déchets en interne ou encore de développer des modèles d’affaires circulaires. Il est également primordial de trouver les locaux adéquats. Les bâtiments sont responsables de 39% des émissions de carbone liées à l’énergie dans le monde, réparties comme suit: 28% proviennent des émissions opérationnelles issues de l’énergie nécessaire au chauffage, au refroidissement et à l’électricité, et 11% découlent des matériaux et des processus de construction.

Les entreprises seront de plus en plus appelées à aborder les facteurs environnementaux au sein de leur chaîne d’approvisionnement, en particulier si elles se trouvent contraintes légalement de mesurer et de publier des informations sur les émissions indirectes de scope 3 provenant de leurs chaînes de valeur ainsi que de la distribution et de l’utilisation de leurs produits.

Rôle au sein de la communauté

Les entreprises peuvent exercer un impact important sur la communauté qui les entoure. Elles peuvent être à la fois source d’emplois et moteur de l’activité économique au sens large, créant de la demande pour les infrastructures et services locaux. Gérer cette dépendance mutuelle avec finesse est important pour nourrir des relations locales harmonieuses.

De plus en plus, les employés attendent des entreprises qu’elles organisent des événements afin de s’engager auprès de la communauté, ce qui a mené à l’essor des journées de volontariat.

De plus en plus, les employés attendent des entreprises qu’elles organisent des événements afin de s’engager auprès de la communauté, ce qui a mené à l’essor des journées de volontariat. Les sociétés peuvent également prendre part directement à des initiatives locales, sponsoriser des œuvres caritatives, des équipes de sport ou des établissements d’enseignement, ou encore proposer une expérience de travail structurée et des formations à la population locale.

Elles doivent également comprendre les préoccupations locales et y répondre, dans des domaines tels que les projets d’expansion, les questions environnementales ou autres points problématiques. Les organisations locales motivées ont le pouvoir de faire bouger les choses, pour le meilleur comme pour le pire.

Agir équitablement envers les fournisseurs et les clients

Il y a quelques années, la pandémie de Covid-19 a mis en lumière les faiblesses de nombreuses chaînes d’approvisionnement, et plus particulièrement celles basées sur un modèle à flux tendu ou axées sur les fournisseurs les moins chers, bien souvent aux dépens d’une offre prévisible et stable. Au début de la pandémie, alors que de nombreux pays fermaient partiellement ou totalement leurs frontières, il a été de plus en plus difficile pour certaines entreprises de réunir les éléments dont elles avaient besoin pour répondre à la demande.

Et même lorsque les restrictions ont été levées, de nouveaux goulets d’étranglement sont apparus, tels que les pénuries géographiques de conteneurs de transport ou de capacités de fret maritime, ce qui a non seulement perturbé les livraisons mais aussi fait exploser les prix des articles les plus prisés. Parallèlement, le consensus de plus en plus large selon lequel la responsabilité d’une entreprise s’étend au-delà de ses seules activités a fait prendre conscience de la réalité suivante: des prix cassés ne justifient plus d’avoir recours à des fournisseurs qui traitent leur personnel de manière injuste ou l’exposent à des risques d’accident ou sanitaires.

Ces dernières années, de nombreuses entreprises se sont par conséquent efforcées de renforcer la prévisibilité et la résilience de leurs chaînes d’approvisionnement, plaçant davantage l’accent sur les relations de confiance et de respect mutuels avec leurs fournisseurs et prêtant une attention particulière à un traitement équitable (par exemple, éviter les prix abusifs ou les retards de paiement). Elles ont également changé leur façon de penser, abandonnant l’idée selon laquelle le moins cher est toujours la meilleure option et reconnaissant que leur réputation peut être entachée par les actions d’un de leurs fournisseurs.

Les entreprises qui savent gérer adroitement ces différentes relations ont toutes les chances d’entretenir de bonnes relations avec leurs clients également. Ces derniers savent identifier les sociétés dont le comportement n’est pas en ligne avec les valeurs qu’elles prétendent défendre. Ils décèlent tout manque de transparence, toute facturation à outrance ou toute manipulation de la part des entreprises. Les bonnes entreprises communiquent avec honnêteté et transparence avec leurs clients.

Il y aura sans nul doute toujours des sociétés qui parviendront à s’en tirer malgré les mauvais traitements infligés à leurs clients, fournisseurs et employés, mais une telle stratégie ne sera pas payante sur le long terme. Les entreprises constatent également que des conflits réguliers avec les parties prenantes externes constituent une distraction désagréable et peu rentable tant pour la direction que pour le personnel. Se positionner en tant qu’entreprise responsable est un mode opératoire bien plus enviable et, à terme, plus aisé.

Les entreprises faisant preuve d’une mauvaise conduite environnementale pourraient devoir débourser des sommes considérables pour réparer les dommages causés, et être confrontées à des coûts de financement accrus alors que les banques entendent protéger leur réputation; cette attitude pourrait par ailleurs inciter les clients et les candidats à l’embauche à aller voir ailleurs.