Contrats: toujours lire avant de signer!
Pour éviter les mauvaises surprises après-coup et pour profiter des avantages auxquels nous avons droit, il est vivement conseillé de bien lire les contrats avant de les signer. Alors pourquoi ne le faisons-nous pas, ou si rarement? myLIFE vous explique pourquoi nous entretenons tous une relation ambiguë avec les contrats et pourquoi il est essentiel de lire au moins les clauses les plus importantes.
Ce qu’il faut retenir
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Chaque jour, des millions d’internautes cliquent sur «J’accepte» ou «J’ai lu et j’accepte les conditions» sans avoir lu une seule ligne des documents qu’ils valident. Toutes ces conditions générales, politiques de confidentialité et autres contrats numériques sont pourtant loin d’être anodins. On y cède parfois ses données personnelles, on renonce à certains droits et on s’expose à des clauses dont on ignore tout. Certes, ce phénomène existait avec les contrats papiers, mais il s’est amplifié à l’ère du numérique et du fameux RGPD qui impose aux entreprises d’obtenir le consentement des consommateurs avant d’utiliser leurs données personnelles.
Céderiez-vous votre premier enfant?
Lisez-vous toujours les contrats avant de signer? La majorité des gens répondent par l’affirmative si on leur pose la question, même si l’écrasante majorité des gens ne le font pas. C’est ce que les chercheurs Jonathan Obar et Anne Oeldorf-Hirsch appellent le phénomène du «plus grand mensonge sur Internet». Dans les faits, nous sommes tellement habitués à accepter des contrats, des conditions générales ou l’utilisation de nos données, que nous les approuvons souvent sans les lire, tout en affirmant le contraire. Mais agir ainsi comporte des risques.
Lisez-vous toujours les contrats avant de signer? La majorité des gens répondent par l’affirmative si on leur pose la question, même si l’écrasante majorité des gens ne le font pas.
Rien n’illustre mieux ce phénomène que l’expérience menée par ces mêmes chercheurs autour d’un faux réseau social qu’ils ont appelé «NameDrop». Des centaines d’étudiants se sont inscrits après avoir cliqué sur «J’accepte» pour confirmer avoir lu et accepté les conditions d’utilisation. Or, ces conditions comprenaient une clause selon laquelle, en s’inscrivant, le nouveau membre cédait son futur premier-né à NameDrop. Évidemment, cette clause volontairement absurde avait uniquement pour objectif de prouver que la validation de la mention «J’ai lu et j’accepte» est souvent une simple formalité pour des internautes qui ne prennent pas la peine de lire ou de comprendre ce type de documents. Dans le cas précis de l’expérience NameDrop, 98% des étudiants ont accepté les conditions sans même se rendre compte qu’ils «cédaient leur premier enfant».
Une autre expérience montre que, en ne lisant pas un contrat jusqu’au bout, on risque également de passer à côté des bénéfices ou droits compris dans le contrat. Cette fois, c’est une compagnie d’assurance voyage qui fait le test en 2019. Elle a ainsi dissimulé une promesse de don 10.000$ à l’intérieur d’une clause en petits caractères figurant dans sa police d’assurance. Il aura fallu que 73 clients souscrivent à la police avant que l’un d’entre eux ne lise enfin la clause cachée et ne réclame la somme promise. Avouez que cela fait réfléchir! Alors laissons tomber le masque et soyons honnêtes: nous sommes très peu nombreux à lire tous les contrats que nous signons. Et les chiffres sont là pour l’attester. Une étude de 2010 révélait que seuls 8% des participants lisent les contrats bancaires avant d’ouvrir un compte, 19% ceux de location de voiture et 25% ceux de pressing. Une autre étude indiquait que plus de 80% des internautes avouent ne pas lire ou à peine les «click-through agreements», et seulement 0,1% lisent la licence associée à un logiciel avant de l’acheter. Dans un sondage mené auprès de 6.045 citoyens de l’Union européenne en 2016, 9% des répondants ont reconnu avoir regretté leur achat en ligne pour ne pas avoir lu les CGV (conditions générales de vente).
Si nous sommes tous conscients de l’importance de lire les contrats qui nous engagent, pourquoi ne le faisons-nous pas? Parce que c’est trop!
Le poids de la charge mentale
Si nous sommes tous conscients de l’importance de lire les contrats qui nous engagent, pourquoi ne le faisons-nous pas? Parce que c’est trop! Avec la multiplication de services numériques, nous sommes littéralement submergés par la quantité de textes à lire. Or, en tant qu’êtres humains, notre capacité cognitive est parfois dépassée par la complexité et le volume des textes. En effet, les conditions générales d’utilisation (CGU) sont souvent de véritables «pavés» juridiques. En se basant sur une vitesse de lecture moyenne de 240 mots/minute, il faudrait environ 36 minutes pour lire celles de Spotify, 31 minutes pour TikTok et plus d’une heure pour Microsoft. Cela prend moins de temps de lire Macbeth que, par exemple, les conditions d’utilisation d’Apple Music.
Avec le RGPD et la loi sur la protection des données, chaque site demande votre autorisation avant de vous offrir des services, voire simplement pour vous laisser surfer sur ses pages. Ce phénomène se reproduisant tout au long de la journée, cela lasse, voire épuise. Pour s’épargner cette surcharge cognitive, nous avons alors tendance à donner notre accord aveuglément. Mais au milieu de tous les contrats anodins que nous acceptons tout au long de la journée, nous risquons de passer à côté d’un contrat méritant toute notre attention.
D’autre part, les contrats sont souvent rédigés dans un jargon juridique peu accessible. Une étude de 2013 a mesuré la lisibilité de contrats de fournisseurs d’énergie et a conclu qu’ils dépassaient largement le niveau de compréhension d’un lecteur adulte moyen. L’accumulation de termes techniques et de phrases complexes, sans résumé clair, décourage la plupart des utilisateurs. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’OCDE en a même conclu qu’il est plutôt «raisonnable» pour les consommateurs de renoncer à cette lecture, tant cela demande un investissement en temps et en effort. En effet, lire l’intégralité des politiques de confidentialité auxquelles nous sommes confrontées représenterait environ 200 heures par personne par an selon certaines estimations, soit un coût annuel de 781 milliards de dollars en «temps perdu».
De bonnes raisons de lire vos contrats
Même si des arguments justifient le «pas le temps de lire», il y a beaucoup à perdre à ne pas lire au moins les clauses les plus importantes des contrats que vous signez et qui vous engagent! Des clauses comme:
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- le renoncement à un recours en justice. De nombreuses CGU incluent des clauses d’arbitrage obligatoire, interdisant de poursuivre la société devant les tribunaux.
- des frais cachés et garanties limitées. Des mentions, souvent peu visibles malgré les règles en vigueur, peuvent prévoir des pénalités, limiter la garantie ou imposer des conditions de retour très strictes.
- la collecte et usage des données personnelles. La plupart des plateformes se réservent le droit de collecter, d’analyser et parfois de revendre à des tiers vos données personnelles (localisation, photos, historique de navigation, etc.). En donnant son consentement sans lire, l’utilisateur ignore ce à quoi il s’expose, par exemple un profilage publicitaire massif et une exposition accrue aux risques de fuite ou de piratage.
- des avantages dont vous n’avez pas conscience. Ne pas lire un contrat, c’est aussi accepter de passer à côté de certains avantages et garanties que celui-ci peut offrir. Par exemple, vos cartes de crédit offrent un tas d’avantages dont vous ne profitez jamais à moins de les faire valoir.
À l’aide d’outils numériques et de l’intelligence artificielle, il est tout à fait possible d’identifier et de comprendre plus rapidement les clauses importantes d’un contrat.
10 conseils pratiques pour mieux lire et comprendre vos contrats
Bonne nouvelle! À l’aide d’outils numériques et de l’intelligence artificielle, il est tout à fait possible d’identifier et de comprendre plus rapidement les clauses importantes d’un contrat. De quoi réduire les efforts cognitifs requis pour savoir sur quoi on s’engage avant de signer. Voici comment vous y prendre pour minimiser les risques et identifier les avantages avant de signer:
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- Repérez les sections clés. Identifiez rapidement les parties du contrat qui abordent des sujets critiques (modalités de résiliation, frais supplémentaires, clauses d’arbitrage, gestion des données personnelles).
- Utilisez la fonction de recherche. Recherchez des mots-clés tels que «frais», «résiliation», «garantie», «pénalité» ou «données». Cela permet de repérer rapidement les passages critiques relatifs à vos droits.
- Lisez les résumés ou points essentiels. Aujourd’hui, de nombreux contrats proposent une synthèse des points clés ou une section dédiée aux «informations essentielles».
- Soyez attentif aux clauses inhabituelles ou mises en valeur. Les parties en majuscules ou mises en exergue signalent souvent des clauses importantes. Prenez le temps de les examiner!
- Comparez avec des contrats similaires. Si vous avez déjà accepté des contrats dans le même domaine (ex. service en ligne, assurance), comparer les principales clauses peut vous aider à identifier des différences à clarifier.
- Parcourez les FAQ ou guides du prestataire. Les entreprises qui valorisent la transparence offrent souvent des explications ou des guides pour décrypter les clauses complexes.
- Consultez des avis et retours d’expérience. Les forums, blogs et avis d’utilisateurs peuvent révéler des points de vigilance sur certains contrats ou vous alerter sur des clauses problématiques.
- Notez vos interrogations. Lorsque vous tombez sur une clause que vous ne comprenez pas ou qui semble trop contraignante, notez-la pour pouvoir la clarifier ultérieurement auprès du service client ou d’un conseiller juridique.
- Utilisez des outils numériques d’aide à la lecture. Certains outils et applications en ligne surlignent les passages à risque et vous aident à identifier rapidement les points essentiels.
- Vérifiez les mises à jour. Lors du renouvellement d’un abonnement ou d’un service, assurez-vous que le contrat n’a pas été modifié. Des modifications, mêmes mineures, peuvent entraîner des conséquences importantes.
Les contrats en ligne sont omniprésents à l’ère du numérique. Sans la moindre vigilance, on risque de céder des droits importants, d’exposer ses données personnelles ou de perdre toute voie de recours. Certes, la longueur et la complexité des CGU expliquent en partie pourquoi tant de gens les ignorent. Cependant, consacrer quelques minutes à une lecture sélective permet d’éviter bien des ennuis et d’identifier tous les avantages figurant au contrat. Prenez la décision de ne plus faire partie de ceux qui, par habitude, cliquent sur «J’ai lu et j’accepte» sans savoir à quoi ils s’engagent. Utilisez les nouveaux outils à votre disposition et prenez le temps d’identifier et de comprendre les clauses essentielles avant de signer.