Parole d’expert : « Douceur amère pour les marchés »
En novembre, la plupart des pays européens se sont une nouvelle fois retrouvés en situation de confinement alors que les gouvernements s’efforçaient de mettre fin à la deuxième vague de contaminations au coronavirus. Même dans les pays n’ayant pas imposé de reconfinement, comme le Luxembourg, une prise de conscience sociale a semblé inciter la population à limiter ses interactions, et l’absence de sortie est redevenue la norme. Les couples ont probablement vécu un scénario à la Sweet November, pour rappeler le film avec Keanu Reeves, forcés de passer le mois en l’unique compagnie l’un de l’autre. Le mois de novembre a été particulièrement clément envers les marchés, et ce à deux égards…
Premièrement, l’incertitude politique s’est dissipée lorsque l’élection de Joe Biden en tant que prochain président des États-Unis a été confirmée et que Donald Trump a accepté cette issue, donnant ainsi le coup d’envoi officiel du processus de transition. Les craintes de voir les résultats de l’élection contestés (voire d’assister à une crise constitutionnelle) étaient bien réelles et pertinentes. Les élections étant maintenant derrière nous, le Congrès peut désormais travailler au deuxième train de mesures de relance budgétaire.
Deuxièmement, un vaccin contre le coronavirus pourrait bientôt voir le jour, deux médicaments candidats ayant obtenu des taux d’efficacité positifs durant les phases de test : 94,5 % pour celui de Moderna et 95 % pour celui de Pfizer/BioNTech. S’est ensuivi un retour de l’appétit pour le risque sur les marchés financiers et une rotation de style en faveur des valeurs de rendement (titres mal-aimés et malmenés par la pandémie) aux dépens des actions de croissance (grands noms de la technologie par exemple).
Cet élan d’optimisme a toutefois été jugulé par la dure réalité du moment, les cas de contamination au coronavirus s’envolant de part et d’autre de l’Atlantique. Les pouvoirs publics ont par conséquent décidé d’imposer de nouveaux confinements, ce qui menace les perspectives économiques. L’Europe flirte déjà avec un scénario de récession à double creux, et le taux de chômage grimpe. De la même manière, aux États-Unis, les demandes d’allocation de chômage sont reparties à la hausse, et la confiance des consommateurs a été ébranlée par la deuxième vague. La mise au point d’un vaccin viable changera la donne pour l’économie. Gardons toutefois à l’esprit que le chemin est encore long avant de pouvoir fabriquer le vaccin et le distribuer au grand public.
La mise au point d’un vaccin viable changera la donne pour l’économie.
Les investisseurs continueront d’osciller entre appétit et aversion pour le risque à mesure qu’ils digéreront les incidents positifs et négatifs sur les marchés. Les portefeuilles doivent se tenir prêts à faire face à cette douceur amère.
Les facteurs qui influencent le moral des investisseurs viennent de toutes parts (données économiques, actualités concernant les entreprises, politiques monétaire et budgétaire et mise au point d’un vaccin). Les traders à court terme, les investisseurs nerveux et les sceptiques peuvent y voir une opportunité de prise de bénéfices soudaine tandis que ceux qui ont peur de passer à côté de bonnes occasions y décèleront sans doute une incitation à prendre le train en marche.
Tant qu’un vaccin modulable n’est pas chose acquise, ces sautes d’humeur se poursuivront. Lorsque les craintes relatives à une pandémie sont élevées, les marchés ont tendance à détenir des valeurs de croissance, dont les bénéficiaires des mesures de confinement. A contrario, lorsque dominent les espoirs de voir la crise sanitaire résolue, les valeurs de rendement connaissent leur moment de gloire. L’environnement actuel ne nous semble certes pas propice à une surperformance durable des valeurs de rendement, mais il convient de protéger les portefeuilles contre les éventuelles sautes d’humeur des marchés. Pour ce faire, nous avons introduit une certaine sensibilité à la conjoncture au moyen de paris sectoriels, principalement en réduisant l’exposition aux valeurs de la consommation de base au profit des valeurs industrielles.
Lorsque les craintes relatives à une pandémie sont élevées, les marchés ont tendance à détenir des valeurs de croissance, dont les bénéficiaires des mesures de confinement.