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19 avril 2024

Réussir à se tromper soi-même

Les biais cognitifs, meilleurs ennemis de l’entrepreneur

Pour réussir, un entrepreneur doit bien évidemment disposer d’un bon business plan. Cela implique d’avoir une idée sur laquelle baser votre projet de création d’entreprise et une vision précise des opportunités commerciales qui peuvent se présenter. Il est également indispensable de définir des objectifs stratégiques et d’établir un plan d’action pour mettre en œuvre son idée. S’y ajoute une planification financière pour les trois à cinq années à venir.

Mais un business plan à lui seul, même le plus abouti, ne suffit pas. Dans cet article, nous souhaitons insister sur certains biais cognitifs qui peuvent être soit des alliés, soit des ennemis de l’entrepreneur.

Un bon business plan est indispensable.

La confiance en soi, c’est bien, mais…

Les études le prouvent, ce sont justement les personnes qui affichent un excès de confiance et qui surestiment systématiquement leurs capacités de succès qui sont les plus susceptibles de devenir entrepreneurs et de réussir. En effet, celles qui ont tendance à éviter les risques n’ont pas l’état d’esprit nécessaire pour se lancer dans l’aventure de la création d’entreprise. Et d’ailleurs, elles ne l’envisagent même pas dans l’écrasante majorité des cas.

Il est aujourd’hui démontré que l’excès de confiance et la prise de risques sont des ingrédients nécessaires pour l’innovation, mais aussi pour la création d’entreprise. Cela ne veut pas dire pour autant qu’ils sont des garanties de succès. Ne pas savoir reconnaître ces biais cognitifs est aussi une cause majeure d’échec. Il s’avère par conséquent judicieux de reconnaître et d’éviter les erreurs de raisonnement irrationnelles. Il est toutefois utile de savoir que, selon la littérature scientifique, être trop rationnel n’est pas un avantage pour réussir dans l’aventure entrepreneuriale et peut même représenter un sérieux handicap.

De manière générale, il faut rester optimiste et prendre conscience de ces biais cognitifs qui influencent l’entrepreneur. Si certains peuvent lui porter préjudice, d’autres constituent des ingrédients de son succès. Comme souvent, tout est une question de dosage ! Lister les biais cognitifs ne suffit pas pour en tirer profit, il faut apprendre à les gérer correctement.

Une étude de Haili Zhang, Van der H. Bij et Michael Song intitulée « Can cognitive biases be good for entrepreneurs? » (« Les biais cognitifs peuvent-ils être favorables aux entrepreneurs ? ») parue en 2020 suggère que le créateur d’entreprise doit trouver le bon dosage entre deux systèmes de pensée : le biais de disponibilité et le biais de représentativité.

Les entrepreneurs doivent se forger un caractère et un état d’esprit qui leur permettent de renforcer leur résistance au stress.

Décider facilement et rapidement

Sous l’emprise du biais de disponibilité, un chef d’entreprise aura tendance à prendre des décisions basées sur des associations d’idées qui lui viennent facilement et immédiatement à l’esprit. Au lieu d’avoir une vision exhaustive de la situation, nous avons tendance à prendre des décisions sur base d’une seule partie des informations disponibles et utiles pour bien décider.

Ce biais est généralement associé à un excès de confiance à l’égard de la validité de son propre jugement et de ses compétences. Il pousse l’entrepreneur à attribuer rétrospectivement et d’une manière causale erronée le résultat d’un événement à sa seule intervention.

Ce système de pensée peut sembler dangereux, mais il présente un avantage majeur : il permet à un chef d’entreprise sous pression et qui doit agir vite sur de multiples tableaux de prendre rapidement des décisions sans se noyer dans une surabondance d’informations.

Le cas individuel comme leitmotiv

Le biais de représentativité décrit la tendance générale à faire d’un cas particulier une généralité. Par exemple, un futur entrepreneur tente de convaincre sa famille de la légitimité de son projet en lui présentant uniquement des success stories d’autres entreprises. De ces exemples qui sont des cas particuliers, il tire la croyance qu’il va lui aussi réussir. Ce faisant, il oublie que ces réussites surmédiatisées sont extrêmement rares par rapport aux nombreuses aventures entrepreneuriales qui finissent mal. Pour rappel, 80 % des entreprises font faillite au cours des 18 mois suivant leur création.

Dans le cadre du biais de représentativité, l’illusion de contrôle joue également un rôle important : l’entrepreneur en herbe sous-estime souvent largement la part de chance nécessaire pour réussir et surestime ses propres compétences.

Amortir les chocs émotionnels

Si l’on n’aborde que superficiellement les biais cognitifs, ils semblent inévitablement négatifs. Certaines études révèlent toutefois que, comme nous l’avons déjà mentionné, il faut être fortement influencé par ceux-ci pour oser créer une entreprise et réussir cette aventure sur le long terme.

La création d’une entreprise est une aventure risquée qui apporte son lot d’émotions fortes. Vouloir systématiquement en rationaliser les étapes n’a pas toujours de sens. Parfois, il faut être capable de foncer.

Il faut trouver la bonne dose d’instinct.

Pour surmonter ces montagnes russes, les entrepreneurs ont besoin de se forger un caractère et un état d’esprit qui leur permettent de renforcer leur résistance au stress, d’asseoir leur conviction et de ne pas éroder leur optimisme. À cet égard, ces biais cognitifs sont bien utiles. Après tout, ce sont ces instincts humains qui ont permis à nos ancêtres et qui nous permettent de survivre aux dangers. Nous devons toutefois éviter de les surestimer.

Un conseil avant de finir : pour rester lucide et progresser, il faut savoir s’entourer de personnes de confiance et écouter ces avis externes, sans pour autant les laisser altérer votre volonté d’aller de l’avant, y compris lorsque certaines décisions sont risquées.