Soldes et promotions: comment ne pas se faire avoir?
Soldes monstres, promos du siècle, prix sacrifiés ou encore offre limitée, Black Friday, Cyber Monday, c’est le moment de sortir la carte de crédit! Mais avant de craquer, assurez-vous que vous êtes vraiment sur le point de faire une bonne affaire et non en face d’une de ces astuces de vos marques préférées qui excellent dans l’art de jouer avec vos sentiments et impulsions. Pour vous permettre de garder le contrôle de vos dépenses face aux soldes et promotions, myLIFE vous aide à faire le tri entre vraies bonnes affaires et techniques marketing.
La période des fêtes est là. Synonyme de joie et de partage, elle rime aussi pour beaucoup d’entre nous avec course aux cadeaux. Jouer au père Noël dans une ambiance festive peut être une réelle source de plaisir à condition de pouvoir surmonter l’angoisse de la dépense et du porte-monnaie vide. Les commerçants l’ont bien compris et ils déploient des trésors d’ingéniosité pour atténuer cette angoisse, tant avant les fêtes que lors des soldes qui suivront. Toutefois, derrières les vitrines décorées et les effets d’annonce «spectaculaires», les bonnes affaires ne sont pas toujours au rendez-vous.
Qui dit promotion ne dit pas forcément bonnes affaires
Particulièrement en période d’avant fêtes, lors des fameux Black Friday et Cyber Monday, les sites marchands ont bien intégré que les consommateurs sont dans un état d’esprit à la fois festif et propice à la dépense, mais aussi fébrile à l’idée de ne pas trouver les bons cadeaux à temps. Ils vont donc exploiter cette charge émotionnelle importante.
Les soldes influencent les consommateurs non seulement d’un point de vue économique mais aussi d’un point de vue émotionnel.
Les soldes influencent les consommateurs non seulement d’un point de vue économique mais aussi d’un point de vue émotionnel. L’important n’est pas que le consommateur fasse une bonne affaire mais qu’il soit persuadé d’en faire une. Dans bien des cas, l’illusion est malheureusement si bonne que vous vous y laissez prendre et allez alors passer à la caisse. Une étude réalisée durant la période de promotions associée au Black Friday et Cyber Monday a en effet démontré que les marchands ne baissent pas toujours leurs prix durant ces périodes d’effervescence, mais investissent plutôt dans du matériel marketing capable de présenter les prix comme étant de bonnes affaires. Leur seul objectif: éveiller votre flamme émotionnelle acheteuse.
Avouons-le, nous ne sommes pas dupes de cette réalité. Mais le plus surprenant, c’est que les études mettent en évidence qu’avoir conscience que nous sommes parfois le dindon de la farce en période de soldes ne protège pas nécessairement contre le fait de craquer à tort et à travers pour des pseudo promotions. Il est temps de s’armer contre notre propre faiblesse!
Grâce à l’économie comportementale qui s’intéresse à cette part d’irrationalité dans la prise de décision humaine, il est possible d’anticiper les biais cognitifs sur lesquels vont jouer les marchands et de déjouer les ressorts marketing déployés pour influencer notre jugement.
Ces biais cognitifs qui nous jouent des tours
Supposons que, en période de soldes, vous écumez pendant des heures les pages d’un site web marchand et que vous tombez sur deux appareils photographiques qui retiennent votre attention. L’appareil A qui valait 110€ s’affiche dorénavant en promotion exceptionnelle pour une durée limitée et dans la limite des stocks disponibles. Son prix initial est barré et le nouveau prix s’affiche désormais à 99€. Le site vous informe en outre qu’il existe une très forte demande pour ce produit depuis le début de la promotion. Un appareil B qui n’est pas en promotion affiche son prix habituel à 99€.
Spontanément, vous êtes plus enclin à acheter l’appareil A qui valait 110€ et qui en vaut aujourd’hui 99€. C’est une bonne affaire, cela semble évident! En pratique votre cerveau fait la comparaison entre 99€ et 110€ et perçoit le fait de gagner 11€ sur le prix initial comme une aubaine, d’autant plus que cela ramène l’appareil A au prix de l’appareil B qui est resté inchangé. De plus, après plusieurs heures de recherche en quête du cadeau idéal, vous voulez enfin vous décider afin de rentabiliser le temps investi. Enfin, le site précise bien que cette promotion n’est valable que sur une quantité limitée d’appareils et pour une durée de temps limitée. Il vous faut l’acheter maintenant. Clic c’est fait.
Avez-vous fait une bonne affaire? Selon quels critères? Au final, vous ne vous êtes jamais demandé s’il s’agissait vraiment du cadeau que vous recherchiez. Fatigué par vos recherches, vous n’avez pas véritablement comparé les deux appareils, en cherchant à savoir pourquoi l’un est soldé et pas l’autre. Enfin, vous n’avez pas évalué la qualité de cette prétendue bonne affaire. La seule chose dont vous êtes sûr, c’est que vous venez d’acquérir pour 99€ un appareil qui en valait autrement 110€. Voyons tous les biais cognitifs qui vous ont amené à craquer.
La théorie des perspectives: quand le consommateur se focalise sur les changements de prix. Votre choix en faveur de l’appareil A s’explique en grande partie grâce à la théorie des perspectives, décrite pour la première fois en 1979 par le Prix Nobel d’Economie, Daniel Kahneman. Contrairement à la théorie économique classique qui postule que vous devriez simplement réfléchir en termes d’utilité (faut-il ou non acheter et dépenser pour cela 99€), la théorie des perspectives affirme que l’être humain est plus sensible aux changements de prix qu’aux prix réels. Autrement dit, au lieu de penser en matière de gain ou perte de 99€, nous pensons gagner sur les deux tableaux: nous avons acheté un appareil photo et gagné 11€ par rapport au prix initial.
En affichant un prix barré et un nouveau prix inférieur, le site marchand vous invite à entrer dans cette logique de perspectives. Tout est une affaire de point de référence pour donner l’impression au consommateur qu’il est gagnant et non perdant. Dans notre exemple, le point de référence est d’autant plus brouillé dans la tête du consommateur qu’il perçoit aussi le fait de pouvoir obtenir un appareil plus cher désormais au même prix qu’un modèle apparemment inférieur.
En vous focalisant sur les changements de prix, les commerçants vous font voir la bouteille à moitié pleine plutôt qu’à moitié vide. C’est peut-être une bonne affaire par rapport au prix initial, mais vous oubliez de prendre en compte d’autres paramètres qui auraient dû dicter votre choix et qui aurait pu vous amener à ne pas acheter. Mais dans cet exemple, d’autres ressorts cognitifs ont aussi été utilisés pour vous faire craquer.
La peur de manquer l’immanquable (Fear of Missing out). En périodes de soldes, les magasins physiques et virtuels inondent les réseaux sociaux et autres médias d’annonces pour leurs promotions. Cette saturation médiatique exerce une influence puissante sur les consommateurs, créant l’impression qu’un événement social majeur avec des opportunités uniques a lieu. À vos yeux, il ne faut surtout pas passer à côté de ce rendez-vous!
L’idée marketing derrière la création de ces rendez-vous commerciaux est de nous faire anticiper le regret de ne pas en profiter.
L’idée marketing derrière la création de ces rendez-vous commerciaux est de nous faire anticiper le regret de ne pas en profiter alors que, dans les faits, l’argent dépensé ne sera peut-être pas compensé par l’acquisition d’un bien qui correspond vraiment à nos besoins.
La preuve sociale. Ce biais cognitif fonctionne en jouant sur notre fibre sociale. Que nous le voulions ou non nous sommes des animaux sociaux et nous voulons ce que les autres peuvent avoir. Cet irrésistible appel à dépenser est également renforcé par un matraquage savamment orchestré sur les réseaux sociaux. Cette très forte influence sociale explique notamment pourquoi certains individus sont prêts à faire la queue avant même l’ouverture d’un magasin sans même savoir si les promotions promises les intéresseront. Leur cerveau leur envoie le signal que si leurs congénères attendent, cela doit valoir la peine de le faire aussi.
L’effet de rareté. Beaucoup de détaillants et magasins communiquent sur le caractère temporaire et éphémère de leurs promotions ou sur les stocks limités des soldes. Cet effet de rareté donne de la valeur au bien mis en évidence et vous aurez tendance à acheter plus en ayant peur de manquer cette promotion immanquable et ceci que la rareté soit avérée ou non. Il est en effet très rare que le consommateur connaisse l’étendue de ces fameux «stocks disponibles» et encore moins la vitesse à laquelle ils s’écoulent.
L’effet d’engagement. La plupart des êtres humains ont du mal à s’engager longuement dans une tâche précise car cela requiert un effort intellectuel important. Dès lors, lorsqu’ils le font, ils entendent avoir un retour sur investissement. Passer plusieurs heures à écumer les rayons d’un magasin ou à faire défiler les pages d’un site Internet représente un certain investissement cognitif. Il vous semble dès lors important de pas avoir fait tout cela pour rien et de ne surtout pas repartir les mains vides. Méfiez-vous des sites et magasins qui, en période de soldes, agencent leurs rayons ou pages afin que vous passiez beaucoup de temps chez eux. L’idée sous-jacente est certainement de vous faire craquer.
L’effet d’ancrage par le chiffre de gauche. Bien que très connu, ce biais demeure très puissant. L’effet d’ancrage décrit la manière dont les individus utilisent la première partie d’information qu’ils perçoivent comme point de référence afin de former leur jugement par rapport à la deuxième partie d’information qui leur sera fournie. En matière de prix, il existe un étrange phénomène nommé l’effet du chiffre de gauche.
En théorie, nous devrions logiquement seulement réagir aux différences de prix importantes affichées entre le prix d’avant et pendant soldes. L’effet du chiffre de gauche est lié à la manière dont notre cerveau convertit les symboles numériques en magnitude mentale mais également au fait que nous lisons les chiffres de gauche à droite. Ainsi en comparant les prix 2,99€ et 3€, notre cerveau se fixe d’abord sur le chiffre 2 et aura tendance à penser que le prix 2,99€ est beaucoup plus intéressant que 3€. Pourquoi? Parce que notre cerveau a encodé la magnitude 2 versus 3 avant même d’avoir lu la totalité des deux prix et évalué d’autres caractéristiques d’un objet ou entre deux objets aux prix proches. Par effet d’ancrage, 2 devient notre point de référence. C’est donc bien pour perturber votre la prise de décision que les spécialistes du marketing usent et abusent des prix se terminant par 9.
La plupart des individus préfèrent obtenir une gratification modeste mais immédiate plutôt qu’attendre plus tard pour obtenir un gain plus important.
La préférence pour l’instant présent. La plupart des individus préfèrent obtenir une gratification modeste mais immédiate plutôt qu’attendre plus tard pour obtenir un gain plus important. Cela se traduit par une tendance à se ruer sur les promotions du moment sans se poser la question de savoir pourquoi ce prix est cassé. La plupart du temps ce qui est le plus désirable est ce que nous pouvons avoir le plus rapidement possible entre nos mains. Forcez-vous à garder la tête froide avant d’acheter. Parfois, le simple fait de se forcer à reporter son achat au lendemain suffit à réaliser que la promotion n’était pas aussi irrésistible que ça.
Vous voilà à présent armé pour identifier les astuces marketing de vos marques préférées. Mais avant de vous ruez dans votre shopping préféré, pourquoi ne pas prendre le temps de dresser un plan d’attaque pour les soldes à venir.
Cet article fait partie du dossier Dossier « Bien décider pour vos finances »
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