Investir en conscience: opter pour des fonds durables
Il existe de bonnes raisons de se tourner vers les fonds d’investissement responsable. Non seulement les fonds durables peuvent vous aider à investir dans des entreprises et des initiatives qui soutiennent la transition énergétique, la protection de l’environnement et l’égalité sociale, mais ils sont généralement considérés comme de meilleurs investissements. Une étude menée par le gestionnaire d’actifs américain Federated Hermes semble indiquer que les entreprises bien notées sur le plan ESG tendent par ailleurs à surperformer leurs pairs sur le long terme, même si les données ne sont pas probantes. Quoi qu’il en soit, investir dans des fonds durables est un moyen de soutenir une cause qui vous tient à cœur et d’exercer un impact positif sur le monde.
Il n’est cependant pas toujours facile de trouver les bons fonds d’investissement. On constate souvent un manque de cohérence entre les différents labels: en quoi un fonds ESG se distingue-t-il par exemple d’un fonds « transition énergétique », « énergie propre » ou « à gestion durable »? Le secteur n’a pas tardé à reconnaître le potentiel de l’investissement responsable. Et si les labels liés à la durabilité sont aujourd’hui nombreux, cela ne signifie pas qu’ils répondent à des définitions robustes et claires.
Un étiquetage compliqué
L’un des problèmes associés à la labellisation des fonds ESG réside dans le manque de cohérence qui entoure les différents labels, qui n’utilisent pas tous les mêmes critères pour qualifier les fonds ESG. Certains fonds peuvent être étiquetés ESG alors qu’ils ne répondent pas à des normes ou à des critères spécifiques.
Au début, il n’y avait guère de consensus sur les paramètres permettant à un fonds de se présenter comme favorisant des caractéristiques environnementales, d’impact social ou de gouvernance. Pour certains groupes de fonds, cela signifiait que le gestionnaire d’actifs examinait si une entreprise était bien gérée, si ses pratiques en termes d’émissions de carbone étaient plus ou moins alignées sur celles de ses pairs et si son comportement était exempt de reproche en matière de droit du travail ou de pollution par exemple. L’approche était tout autant un outil de gestion des risques qu’un accélérateur de performance.
Pour d’autres, l’investissement durable était un processus beaucoup plus complexe, impliquant l’exclusion de secteurs tels que le tabac ou l’armement, et souvent un engagement de fond auprès des entreprises bénéficiaires des investissements pour provoquer le changement, ou encore le recours à l’exercice des droits de vote lors des assemblées d’actionnaires ou la menace d’un désinvestissement pour influencer les pratiques des entreprises qui ne répondaient pas à leurs exigences. Pas toujours facile à suivre pour les investisseurs, qui étaient alors contraints de mener des recherches intensives pour séparer le bon grain de l’ivraie.
Les investisseurs devaient déterminer par eux-mêmes si un fonds correspondait à leurs valeurs et s’ils en tiraient effectivement un bénéfice par rapport aux investissements traditionnels.
Les investisseurs devaient se faire leur propre opinion face aux allégations de greenwashing, une pratique commerciale trompeuse mais courante, consistant pour un gestionnaire d’actifs à qualifier dʼ« ESG » ou de « durable » des produits dont l’approche d’investissement ne semblait pas différer sensiblement de celle des fonds ne revendiquant aucunement le respect de normes éthiques ou une quelconque responsabilité environnementale. Les investisseurs devaient déterminer par eux-mêmes si un fonds correspondait réellement à leurs valeurs et s’ils en tiraient effectivement un bénéfice par rapport aux investissements traditionnels.
Mais avec l’émergence des nouvelles classifications de fonds (et en particulier le Règlement de l’Union européenne sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers ou SFDR), qui visent à garantir que les investisseurs comprennent ce qu’ils achètent, tout cela est en train de changer. On observe également de plus en plus de clarté dans les définitions au niveau des paramètres et du langage de l’investissement responsable, sous l’impulsion de la taxinomie verte de l’UE et d’autres initiatives de standardisation et de classification en cours de développement dans plusieurs juridictions.
Une multiplicité d’approches
Désormais, les fonds commercialisés dans l’UE relèvent de l’une des trois catégories suivantes: article 6, article 8 (vert clair) ou article 9 (vert foncé) selon la législation SFDR. Les fonds relevant de l’article 6 n’intègrent aucune mesure de durabilité dans leur processus d’investissement et sont libres d’inclure des actifs par exemple liés au tabac, aux jeux d’argent ou à l’armement, ainsi que des entreprises liées aux combustibles fossiles.
Les fonds relevant de l’article 8 promeuvent des caractéristiques d’impact environnemental et social, lesquelles sont intégrées au processus de décision d’investissement. Les fonds relevant de l’article 9 sont des produits d’investissement ayant un objectif durable et respectant une proportion minimale d’investissements durables (tels que définis dans la taxinomie). Cette catégorie couvre les fonds qui ciblent des investissements durables sur mesure, comme les fonds à impact, ou ceux alignés sur les indices de référence changement climatique basés sur l’objectif de zéro émission nette de l’Accord de Paris. Mais ne soyez pas surpris, les fonds article 8 ou article 9 peuvent toujours investir dans des entreprises « en transition » et restent donc, de ce fait, potentiellement exposés à des activités controversées (comme les combustibles fossiles).
Voilà qui autorise encore une certaine liberté au niveau de l’approche d’investissement employée, ce qui explique pourquoi les acteurs de l’analyse de fonds ont cherché à définir leurs propres paramètres pour l’investissement responsable. L’entreprise d’information financière Defaqto utilise par exemple une pyramide à quatre niveaux, avec à sa base l’intégration ESG (l’approche la plus couramment utilisée). Selon le tout dernier rapport ESG de l’Investment Association au Royaume-Uni, 22% des fonds membres intègrent les facteurs ESG dans au moins 75% de leurs portefeuilles, un chiffre appelé à augmenter d’ici 2024 selon l’organisation.
Objectifs de développement durable
Le deuxième niveau identifié par Defaqto consiste à exclure certains secteurs moins vertueux, généralement le tabac, l’armement ou la pornographie – bien que de nombreux fonds sans revendication de durabilité évitent souvent ces secteurs. Viennent ensuite les fonds axés sur la durabilité, qui cherchent à investir dans des entreprises ciblant des objectifs de durabilité spécifiques, tels que l’énergie propre ou la préservation de la biodiversité. Au sommet de la pyramide se trouvent les fonds d’investissement à impact, qui ont un double mandat : atteindre des objectifs de durabilité spécifiques et offrir un rendement financier aux investisseurs.
Les objectifs de développement durable des Nations unies, définis en 2015 et approuvés par 193 pays, ont fourni des repères importants pour fixer des objectifs et dégager un consensus en faveur de l’investissement responsable. Il existe actuellement 17 objectifs, à vocation environnementale (lutte contre le changement climatique ou la pollution des océans, etc.) et sociale (réduction des inégalités, éducation de qualité, etc.).
De plus en plus, les agences de notation mettent à disposition des outils logiciels pour aider les investisseurs à évaluer les caractéristiques ESG de certains fonds.
De plus en plus, les agences de notation mettent à disposition des outils logiciels pour aider les investisseurs à évaluer les caractéristiques ESG de certains fonds. Morningstar, par exemple, a mis au point des notations de durabilité au niveau des fonds, qui permettent aux investisseurs de mieux s’orienter vers les produits qu’ils préfèrent. Les investisseurs peuvent également déléguer à un gestionnaire discrétionnaire ou multi-actifs le processus de sélection des fonds individuels en fonction de leurs objectifs spécifiques. Cette tâche est devenue plus facile avec la diversification croissante de l’investissement durable, rendue possible par la création de fonds spécialisés dans les obligations, l’immobilier et les infrastructures, mais aussi les actions.
Ressources ESG
Pour la plupart, les sociétés de gestion d’actifs partagent volontiers leurs références ESG avec les investisseurs et fournissent généralement sur leur site Internet des informations précises sur leur démarche d’engagement auprès des entreprises individuelles, leurs pratiques en matière de vote et les émetteurs ou secteurs ayant fait l’objet d’un désinvestissement. Cela peut permettre aux investisseurs de savoir si un gestionnaire d’investissement est aussi sérieux qu’il le prétend en matière d’investissement responsable.
Les investisseurs peuvent également examiner de plus près les ressources ESG d’un groupe de fonds : disposent-ils d’une équipe dédiée à l’analyse ESG, de systèmes propriétaires ou d’un accès à des études indépendantes ? Ces informations sont souvent disponibles sur les sites Internet des sociétés de gestion et fournissent une indication supplémentaire sur la profondeur de l’engagement des fonds.
Il est évident qu’en matière d’investissement durable, il n’existe pas de solution unique. La meilleure façon de vous assurer que votre investissement est aligné sur vos valeurs personnelles consiste à examiner chacun des investissements sous-jacents du fonds en question.
Enfin, il ne faudrait pas que les références en matière de durabilité éclipsent toutes les autres considérations. Un gestionnaire de fonds doit toujours maîtriser les principes fondamentaux de son métier, à savoir sélectionner des entreprises rentables et solides et saisir les opportunités sans prendre de risques injustifiés. Mais les possibilités ne cessent de se multiplier pour les investisseurs qui veulent s’assurer que leur portefeuille soit en phase avec leurs principes.
Les nouvelles classifications de fonds (et en particulier le Règlement de l’Union européenne sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers ou SFDR) visent à garantir que les investisseurs comprennent ce qu’ils achètent.