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20 novembre 2024

Résidences secondaires: enjeux climatiques et responsabilité sociale

Les maisons de vacances ont toujours séduit. Que demander de mieux qu’un pied-à-terre dans un lieu dépaysant, souvent au soleil, ou encore tout à côté des pistes de ski ou dans une ville étrangère. Elles promettent détente immédiate et escapade facile et peuvent représenter pour certains propriétaires une source de revenus locatifs réguliers permettant de couvrir au moins une partie des coûts. Aujourd’hui pourtant, les investisseurs qui souhaitent acquérir une résidence secondaire doivent étudier les aspects sociaux et environnementaux liés au bien et à son emplacement.

La demande de résidences secondaires s’est véritablement envolée durant la pandémie de Covid-19. La vie citadine était devenue étouffante, plus particulièrement pour les résidents en appartements, tandis que le télétravail, depuis n’importe quel logement, offrait une plus grande liberté de mouvement. La ruée vers l’immobilier s’est quelque peu atténuée en 2022 lorsque les mesures de confinement ont été levées, tandis que l’environnement de travail post-pandémie s’est révélé, dans certains secteurs, bien moins flexible qu’il n’y paraissait à première vue. Quoi qu’il en soit, nombreuses sont les familles qui aimeraient acquérir une résidence secondaire.

Cependant, les résidences secondaires peuvent impliquer un coût pour la planète et pour la société, un constat toujours plus évident parmi la population. De plus en plus, les acquéreurs potentiels se rendent également compte qu’ils ne peuvent ignorer les risques liés au changement climatique: une villa en front de mer en Floride pourrait se retrouver sous eaux dans quelques années, tandis qu’un chalet dans une station de ski pourrait bientôt ne plus offrir une vue que sur des rochers. Un immeuble à appartements tout de béton et de verre en plein cœur d’une ville pourrait bien être l’épicentre d’un puits de chaleur.

Les résidences secondaires peuvent impliquer un coût pour la planète et pour la société, un constat toujours plus évident parmi la population.

Empreinte carbone

Il faut également prendre en compte l’empreinte carbone associée aux trajets aller-retour, surtout s’il est question de plusieurs vols par an. Les émissions des trajets en voiture finissent elles aussi par s’additionner. 3,4 millions de résidences secondaires sont réparties sur le territoire français, ce qui représente un nombre considérable de trajets à forte intensité de carbone chaque année. Même scénario pour d’autres pays tels que l’Italie, l’Espagne et le Portugal.

Et pour les personnes très fortunées, plus susceptibles de posséder plusieurs propriétés aux quatre coins du monde, le coût environnemental s’en trouve démultiplié. Selon une recherche effectuée par la compagnie d’assurance AIG, les citoyens les plus riches des États-Unis possèdent jusqu’à neuf résidences secondaires dans divers endroits du monde. Ils s’y rendent souvent en jet privé: le moyen de transport affichant la plus forte intensité carbone.

Les résidences secondaires ont également des répercussions sociales. Certaines municipalités d’Europe sont devenues de véritables villes fantômes en basse saison, car la plupart des propriétaires ne sont là que durant les vacances. Non seulement l’économie locale s’en trouve pénalisée, mais cette dynamique donne également lieu à un décalage entre les salaires locaux et le coût des logements, moins accessibles.

Dans certains pays, les populations locales accusent les résidences secondaires et les locations de courte durée de détruire leurs communautés et de miner la cohésion locale. Être propriétaire de deux biens peut en outre poser problème si l’offre de logements abordables est globalement insuffisante dans le pays concerné.

Si, pour beaucoup, ces facteurs ne suffiront pas à les faire renoncer au rêve d’une résidence secondaire, ils pourraient par contre rendre celui-ci plus onéreux. Les gouvernements européens reconnaissent de plus en plus les problèmes liés à la détention non réglementée d’une résidence secondaire, et imposent désormais des taxes plus élevées. De même, les établissements de prêt durcissent leurs critères d’octroi. Tout cela peut faire grimper la facture pour les propriétaires, surtout s’ils ne se comportent pas de manière responsable.

Bien immobilier et responsabilité

Il est toutefois possible de se montrer plus responsable en tant que propriétaire et de contribuer ainsi à préserver les régions appréciées par la population et à tisser des liens locaux sans désavantager ou contrarier les résidents permanents. Cela peut aussi permettre d’éviter le risque de se voir imputer des coûts plus élevés que prévu par les gouvernements cherchant à renforcer la législation applicable aux propriétaires non-résidents.

S’investir dans la communauté locale autant que possible pourrait bien être l’élément le plus important.

S’investir dans la communauté locale autant que possible pourrait bien être l’élément le plus important. Du point de vue des résidents permanents, les biens achetés principalement dans le but d’être loués pour les vacances peuvent s’avérer particulièrement agaçants. Dans bien des cas en effet, cela se traduit par une multitude d’occupants à court terme négligents et souvent bruyants, un problème qui s’est sensiblement aggravé depuis l’émergence d’Airbnb. En revanche, acquérir un bien que vous avez l’intention d’occuper régulièrement dans une région où vous pouvez participer à la vie locale, même ponctuellement, est plus judicieux.

Autre élément important : les options de transport. Si un vol, à forte intensité de carbone, est le seul moyen de transport que vous puissiez raisonnablement utiliser pour vous rendre dans votre résidence secondaire, les émissions de gaz à effet de serre en découlant auront des effets néfastes et continus sur le climat. Il est beaucoup plus respectueux de l’environnement de se décider pour un bien accessible en voiture (électrique de préférence) ou, mieux encore, en train.

Donner une nouvelle vie aux propriétés désaffectées

Si vous construisez une nouvelle maison ou rénovez un bien abandonné plutôt que d’acheter une propriété existante en bon état, vous ne soustrayez pas un bien au marché. Il existe partout en Europe des programmes visant à promouvoir la construction responsable, grâce auxquels financer la construction ou la rénovation d’une résidence secondaire devient plus facile.

En 2020 par exemple, le gouvernement italien a lancé un programme ambitieux permettant aux propriétaires fonciers de financer 110% des travaux de rénovation destinés à améliorer l’efficacité énergétique grâce à des déductions d’impôts. Certaines municipalités ont également cédé pour une bouchée de pain des propriétés dans des villages sur le déclin, voire en ont fait cadeau, à des étrangers ayant à cœur de donner un nouveau souffle à des communautés en perte de vitesse. En France, le taux de la TVA est réduit pour les travaux visant la rénovation, la conversion ou la réfection de biens résidentiels, et il est encore plus restreint pour les travaux destinés à réaliser des économies d’énergie.

Par ailleurs, les acheteurs doivent de plus en plus veiller à ce que la résidence secondaire qu’ils convoitent ne se situe pas dans une zone à risque. Bien des régions du monde, en Europe notamment, risquent de graves conséquences liées aux changements des tendances climatiques (inondations, sécheresse, élévation du niveau de la mer).

Le Canada, l’Allemagne et le Japon font partie des 10 pays qui devraient être les plus touchés par le changement climatique. En juillet 2021, l’Allemagne a connu des inondations catastrophiques qui ont fait près de 200 victimes. Entre décembre 2023 et janvier 2024, certaines régions du pays ont enregistré les plus fortes précipitations depuis le début des relevés en 1881. En France, en Grèce, en Espagne et au Portugal, les feux de forêt et les épisodes de sécheresse sont de plus en plus fréquents durant la période estivale, notamment dans certaines régions touristiques très prisées.

Si de nombreuses familles ont à cœur d’acquérir une résidence secondaire, les répercussions sociales et environnementales ne peuvent plus être ignorées aujourd’hui. Une approche responsable qui vise à éviter tout stress climatique supplémentaire et qui s’avère positive pour les régions et les communautés locales est intéressante à cet égard.