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29 mars 2024

Résidences secondaires : enjeux climatiques et responsabilité sociale

Les maisons de vacances ont toujours séduit. Que demander de mieux qu’une résidence familiale dans un lieu plus exotique, souvent au soleil, ou encore tout à côté des pistes de ski ou dans une ville étrangère. Elles promettent détente immédiate et escapade facile et peuvent parfois être source de revenus réguliers. Aujourd’hui pourtant, les investisseurs qui souhaitent acquérir une résidence secondaire doivent étudier les aspects sociaux et environnementaux liés au bien et à son emplacement.

La demande de résidences secondaires s’est véritablement envolée durant la pandémie de Covid-19. La vie citadine était devenue étouffante, plus particulièrement pour les résidents en appartements, tandis que le télétravail, depuis n’importe quel logement, offrait une plus grande liberté. La ruée vers l’immobilier s’est quelque peu atténuée en 2022 lorsque les mesures de confinement ont été levées, tandis que l’environnement de travail post-pandémie s’est révélé, dans de nombreux secteurs, bien moins flexible qu’il n’y paraissait à première vue. Quoi qu’il en soit, nombreuses sont les familles qui aimeraient acquérir une résidence secondaire.

Néanmoins, celles-ci s’accompagnent souvent d’un coût pour la planète et pour la société, un constat toujours plus évident parmi la population. De plus en plus, les acquéreurs potentiels se rendent compte qu’ils pourraient subir les effets du changement climatique : une villa en front de mer à Miami pourrait se retrouver sous eaux dans quelques années, tandis qu’un chalet dans une station de ski pourrait bientôt ne plus offrir une vue que sur des rochers. Un immeuble tout de béton et de verre en plein cœur d’une ville pourrait bien être l’épicentre d’un puits de chaleur.

Les résidences secondaires s’accompagnent souvent d’un coût pour la planète et pour la société, un constat toujours plus évident parmi la population.

Empreinte carbone

Il faut également prendre en compte l’empreinte carbone associée aux trajets aller-retour, surtout s’il est question de plusieurs vols par an. Les émissions des trajets en voiture finissent elles aussi par s’additionner. 3,4 millions de résidences secondaires sont réparties sur le territoire français, ce qui représente un nombre considérable de trajets à forte intensité de carbone chaque année. Même scénario pour l’Italie, l’Espagne et le Portugal.

Et pour les personnes très fortunées, plus susceptibles de posséder plusieurs propriétés aux quatre coins du monde, le constat est encore plus alarmant. Une recherche effectuée par la compagnie d’assurance AIG a conclu que les citoyens les plus riches des États-Unis possédaient jusqu’à neuf résidences secondaires dans divers endroits du monde. Dans bien des cas, ils s’y rendent en jet privé : le moyen de transport affichant la plus forte intensité carbone.

Les résidences secondaires ont également des répercussions sociales. Hors saison, ce sont de véritables villes fantômes qui fleurissent un peu partout en Europe, car la grande majorité des résidents sont des saisonniers ou n’y habitent que temporairement. Non seulement l’économie locale s’en trouve pénalisée, mais cette dynamique donne également lieu à un décalage entre les salaires locaux et le coût des logements, moins accessibles. Les populations locales accusent les résidences secondaires de détruire leurs communautés et de miner la cohésion locale. Dans certains pays, être propriétaire de deux biens pose en outre problème alors que l’offre de logements est globalement insuffisante.

Si, pour beaucoup, ces facteurs ne suffiront pas à briser le rêve d’une résidence secondaire, ils pourraient par contre rendre celui-ci plus onéreux. Les gouvernements européens reconnaissent de plus en plus les problèmes liés à la détention non réglementée d’une résidence secondaire, et imposent désormais des taxes plus élevées. De même, les sociétés de financement durcissent les critères d’emprunt. Les propriétaires de seconde résidence pourraient ainsi voir leurs finances affectées, d’autant plus s’ils n’adoptent pas des comportements responsables.

Bien immobilier et responsabilité

Il est toutefois possible de se montrer plus responsable en tant que propriétaire et de contribuer ainsi à préserver les régions appréciées par la population, à tisser des liens locaux et à ne pas désavantager ou contrarier les résidents permanents. Cela peut aussi permettre d’éviter le risque de se voir imputer des coûts plus élevés que prévu par les gouvernements, qui renforcent la législation applicable aux propriétaires non-résidents.

S’investir dans la communauté locale autant que possible pourrait bien être l’élément le plus important.

S’investir dans la communauté locale autant que possible pourrait bien être l’élément le plus important. Pour les résidents permanents, il est particulièrement agaçant lorsque les biens sont achetés principalement dans le but d’être loués pour les vacances. Dans bien des cas en effet, cela se traduit par une multitude d’occupants à court terme négligents et souvent bruyants, un problème qui s’est sensiblement aggravé depuis l’émergence d’Airbnb. En revanche, acquérir un bien que vous avez l’intention d’occuper régulièrement dans une région où vous pouvez participer à la vie locale, même ponctuellement, est plus judicieux.

Autre élément important : les options de transport. Si un vol, à forte intensité de carbone, est le seul moyen de transport que vous puissiez raisonnablement utiliser pour vous rendre dans votre résidence secondaire, cela aura des effets néfastes et continus sur le climat. Il est beaucoup plus respectueux de l’environnement de se décider pour un bien accessible en voiture (électrique de préférence) ou, mieux encore, en train.

Donner une nouvelle vie aux propriétés désaffectées

Si vous construisez une nouvelle maison ou rénovez un bien abandonné plutôt que d’acheter une propriété existante en bon état, vous ne soustrayez pas un bien au marché. Il existe partout en Europe des programmes visant à promouvoir la construction responsable, grâce auxquels financer la construction d’une résidence secondaire devient plus facile. En 2020 par exemple, le gouvernement italien a lancé un programme ambitieux permettant aux propriétaires fonciers de financer 110 % des travaux de rénovation destinés à améliorer l’efficacité énergétique grâce à des déductions d’impôts. Certaines municipalités ont également fait cadeau de propriétés dans des villages sur le déclin à des étrangers souhaitant les occuper afin de donner un nouveau souffle à des communautés en perte de vitesse. En France, le taux de la TVA est réduit pour les travaux visant la rénovation, la conversion ou la réfection de biens résidentiels, et il est encore plus restreint pour les travaux destinés à réaliser des économies d’énergie.

Il est de plus en plus important également de choisir une seconde résidence qui ne se situe pas dans un endroit à risque. Même si les efforts déployés à l’international pour freiner le réchauffement climatique portent leurs fruits et limitent la hausse alarmante des températures, bien des régions du monde, l’Europe notamment, risquent de graves conséquences liées aux changements des tendances climatiques (inondations, sécheresse, élévation du niveau de la mer). Certes, nombre des régions fortement affectées se situent dans le monde émergent, en Inde et en Afrique par exemple, mais le Canada, l’Allemagne et le Japon font partie des 10 pays qui devraient être les plus touchés par le changement climatique. Durant l’été 2022, des feux de forêt et des sécheresses ont sévi en France, en Espagne et au Portugal, notamment dans des régions connues pour leurs lieux de vacances très prisés.

Pour beaucoup, une résidence secondaire est un objectif à long terme. Aujourd’hui toutefois, les répercussions sociales et environnementales ne peuvent plus être ignorées. Une approche responsable qui vise à éviter tout stress climatique supplémentaire et qui s’avère positive pour les régions et les communautés locales est intéressante à cet égard.